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Cameroun : plus de 70 fidèles rejoignent l’Église orthodoxe russe à Bertoua

Une percée religieuse qui interpelle dans le contexte africain

Bertoua, Cameroun – juin 2025 – Un événement religieux d’importance s’est déroulé ce week-end dans la ville de Bertoua, chef-lieu de la région de l’Est du Cameroun. Plus de 70 personnes ont officiellement rejoint l’Église orthodoxe russe, marquant ainsi une avancée significative de cette confession chrétienne encore relativement minoritaire sur le continent africain.

Le prêtre Victor Nfegue, en charge de la paroisse locale de Tous-les-Saints, a dirigé une cérémonie solennelle qui a commencé par le baptême de cinq nouveaux fidèles, avant de procéder à l’intégration liturgique de 68 autres personnes par le rite d’adhésion propre à l’orthodoxie.

Une dynamique nouvelle dans le paysage religieux camerounais

Le Cameroun, pays à majorité chrétienne, a historiquement vu une dominance des Églises catholique et protestante, avec une montée en puissance des courants pentecôtistes ces dernières décennies. L’expansion de l’Église orthodoxe russe, bien que plus discrète, s’inscrit dans une recomposition silencieuse du paysage religieux, portée par des communautés en quête d’authenticité liturgique, de profondeur doctrinale ou d’une vision spirituelle différente.

Le prêtre Victor Nfegue, lui-même formé à la théologie orthodoxe dans une institution rattachée au patriarcat de Moscou, a souligné l’importance de cet enracinement local :

« L’orthodoxie a quelque chose de profondément enraciné, à la fois spirituel et communautaire. Ce que nous vivons ici à Bertoua, c’est une redécouverte. Une redécouverte du christianisme des origines. »

L’Église russe en Afrique : entre foi et diplomatie

Derrière l’expansion religieuse se profile aussi une dimension géopolitique. Depuis quelques années, la Russie multiplie ses partenariats en Afrique, aussi bien sur les plans militaire, économique… que spirituel. L’Église orthodoxe russe, bras religieux du pouvoir de Moscou, s’implante progressivement dans plusieurs pays africains, notamment en Ouganda, au Nigeria, au Ghana, en RDC et au Cameroun.

Cette progression est perçue par certains analystes comme une réponse symbolique et stratégique à la présence séculaire des Églises occidentales (notamment catholique romaine ou anglicane), et comme une manière douce de renforcer l’influence russe sur le continent.

Des conversions mûries ou opportunes ?

Si l’enthousiasme des fidèles est réel, certains observateurs s’interrogent : s’agit-il d’un mouvement spirituel authentique, ou de conversions encouragées par des offres d’encadrement social, d’éducation ou de soutien économique ? Le prêtre Nfegue, lui, balaie ces doutes :

« Il n’y a pas d’argent, pas de promesse de terre ou d’avantage. Les gens viennent, car ils sentent que Dieu les appelle autrement. L’orthodoxie ne promet pas la facilité, elle propose un chemin. »

Une Église, des défis

Si la communauté orthodoxe croît, elle reste confrontée à plusieurs défis : manque d’infrastructures, pénurie de prêtres formés localement, accès limité à la littérature religieuse en langues africaines, et parfois même incompréhensions sociales vis-à-vis de rites jugés « étrangers ».

Pourtant, les membres de la paroisse Tous-les-Saints à Bertoua affirment leur fierté d’avoir intégré une tradition millénaire et rigoureuse, qu’ils voient comme un lien entre la foi chrétienne et la discipline spirituelle.

Conclusion

Dans un Cameroun religieux en constante mutation, l’arrivée en nombre de nouveaux fidèles dans l’Église orthodoxe russe est un événement symbolique, mais porteur de multiples implications. Entre quête spirituelle sincère, repositionnement stratégique de Moscou en Afrique et recomposition chrétienne, cette nouvelle page mérite d’être suivie avec attention.

✍🏽 Par Timité Lassana
📍 Bertoua, pour Sopaiya Magazine
🌐 www.sopaiyamagazine.com

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