Quand la solidarité rencontre les murs : la « Global March to Gaza » stoppée au Caire, la « Caravane Soumoud » arrêtée à Syrte

Par Timité Lassana | Sopaiya Magazine

Une mobilisation panafricaine et mondiale pour Gaza, freinée sur le terrain

En cette année 2025 marquée par une recrudescence dramatique du conflit israélo-palestinien, des mouvements citoyens ont émergé dans plusieurs pays africains et arabes pour témoigner de leur solidarité avec le peuple de Gaza, soumis à un blocus depuis plus de 17 ans et victime d’attaques incessantes.

Parmi ces initiatives, deux mobilisations majeures se sont distinguées : la « Global March to Gaza », partie d’Égypte, et la « Caravane Soumoud », lancée depuis Tunis. Mais toutes deux ont été brutalement interrompues, révélant les contradictions profondes entre solidarité populaire et réalités politiques dans la région.

🇪🇬 Le Caire bloque la « Global March to Gaza »

Le vendredi 13 juin 2025, plusieurs dizaines de militants, parmi lesquels des activistes africains, européens, palestiniens de la diaspora et membres d’ONG humanitaires, ont quitté Le Caire à destination d’Ismaïlia, première étape vers Rafah, ville frontalière de Gaza. Objectif : dénoncer le blocus israélo-égyptien de l’enclave palestinienne et faire pression pour l’ouverture d’un corridor humanitaire.

👉 Mais très vite, la police égyptienne intervient. Des véhicules sont stoppés, certains militants sont placés en détention préventive, d’autres contraints de rebrousser chemin. Les autorités invoquent des raisons de sécurité, mais les organisateurs dénoncent un véritable sabotage de la part d’un régime complice de l’isolement de Gaza.

🗣️ « Nous ne portions aucune arme. Nos seules armes étaient des pancartes, des drapeaux et des chansons de paix. Pourquoi nous arrêter ? » – témoignage d’un militant burkinabè, bloqué à Ismaïlia.

🇱🇾 Syrte : la « Caravane Soumoud » face aux lignes de Haftar

Pendant ce temps, en Afrique du Nord, une autre colonne de solidarité progressait depuis Tunis. La « Caravane Soumoud », nommée d’après le mot arabe signifiant résilience et ténacité, réunissait plusieurs véhicules transportant des vivres, du matériel médical, et des militants de la société civile tunisienne, algérienne et mauritanienne.

➡️ Après avoir traversé sans incident le sud tunisien, la caravane est stoppée à l’entrée de Syrte, ville tenue par les forces du maréchal Khalifa Haftar, figure forte de l’est libyen, soutenu par les Émirats arabes unis et indirectement par certains réseaux pro-israéliens.

🔒 Interdiction de poursuivre la route. Les membres de la caravane sont invités à rebrousser chemin sous prétexte de sécurité nationale. Pourtant, aucune mesure d’acheminement alternatif de l’aide n’est proposée.

🎯 Une solidarité bridée par la géopolitique régionale

Ces deux blocages ne sont pas des faits isolés. Ils traduisent la gêne croissante de certains régimes arabes face à une mobilisation populaire indépendante, qui échappe aux cadres diplomatiques traditionnels.

L’Égypte, pourtant voisine de Gaza, maintient le poste-frontière de Rafah hermétiquement fermé la plupart du temps, par peur de voir Gaza redevenir une plateforme du Hamas ou de ses rivaux islamistes.

En Libye, le pouvoir militaire de Haftar, soutenu par des intérêts proches d’Israël, redoute qu’une caravane solidaire ne ravive les tensions entre factions rivales et ne complique ses rapports internationaux.

En réalité, le blocus de Gaza ne tient pas uniquement à Israël. Il est renforcé par la passivité – voire la complicité – de certains gouvernements arabes, qui redoutent que la cause palestinienne ne ravive des contestations populaires internes.

🕊️ Une solidarité plus forte que les frontières

Malgré ces obstacles, les militants ne se disent pas vaincus. À Tunis, Alger, Dakar, Abidjan, Bamako, des mobilisations parallèles voient le jour : sit-in, concerts de soutien, collectes de dons, veillées aux bougies.

🗣️ « Gaza vit en nous, même si on nous empêche de marcher vers elle. » – déclaration d’une militante ivoirienne à Sopaiya Magazine.

📌 Conclusion : au-delà des routes, une cause

L’histoire retiendra que la marche a été interrompue. Mais le mouvement est lancé. Chaque slogan, chaque pancarte, chaque pas bloqué aujourd’hui, est une graine semée pour une Afrique solidaire, consciente de son rôle dans les équilibres de ce monde.

À Sopaiya Magazine, nous continuerons à documenter ces mouvements, ces voix et ces visages qui refusent l’oubli, même face aux murs de la politique.

✍️ Timité Lassana
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